TOBGUI, Fawzia. - "De l’anarchisme au fédéralisme. Articulation entre droit et État dans le système politique de Proudhon".

PROUDHON, Pierre-Joseph (1809-1865)droitÉtat et étatismeTOBGUI, FawziaTOBGUI, Fawzia

Au cours des années, le statut que Proudhon accorde à l’État se modifie considérablement, comme en témoignent deux extraits, l’un tiré de Polémique contre Louis Blanc et Pierre Leroux, dans lequel il affiche sans équivoque une position anarchiste, et l’autre, tiré de La Justice, qui nuance considérablement sa première prise de position.

Dans Polémique contre Louis Blanc et Pierre Leroux, Proudhon affirme que :

« l’État est la constitution extérieure de la puissance sociale. Par cette constitution extérieure de sa puissance et souveraineté, le peuple ne se gouverne pas lui-même : c’est, tantôt un individu, tantôt plusieurs, qui, à titre électif ou héréditaire, sont chargés de le gouverner, de gérer ses affaires […]. L’État doit-il exister encore lorsque la question du travail et du capital sera opérée ? En d’autres termes, aurons-nous toujours, comme nous l’avons eue jusqu’à présent, une Constitution politique en dehors de la constitution sociale ? Nous répondons par la négative. Nous soutenons que, le capital et le travail une fois identifiés, la société subsiste par elle-même et n’a plus besoin de gouvernement. Nous sommes, en conséquence, et nous l’avons proclamé plus d’une fois, des anarchistes. L’anarchie est la condition d’existence des sociétés adultes, comme la hiérarchie est la condition des sociétés primitives […]. Louis Blanc et Pierre Leroux affirment le contraire : outre leur qualité de socialistes, ils retiennent celle de politiques ; ce sont des hommes de gouvernement et d’autorité, des hommes d’État. Nous nions le gouvernement et l’État parce que nous affirmons, ce à quoi les fondateurs d’États n’ont jamais cru, la personnalité et l’autonomie des masses […]. Nous affirmons, enfin, que cette anarchie, qui exprime, comme on le voit maintenant, le plus haut degré de liberté et d’ordre auquel l’humanité puisse parvenir, est la véritable formule de la République, le but auquel nous pousse la révolution de Février. »

Ce premier texte, paru en décembre 1849 dans La Voix du peuple, est essentiel pour appréhender la position politique du Proudhon des années post-révolutionnaires ; en 1850, Proudhon le reprit d’ailleurs dans un ouvrage intitulé Actes de la révolution : Louis Blanc et Pierre Leroux, ce qui atteste l’importance qu’il lui accordait. Pourtant, quelques années plus tard, en 1858, un passage de La Justice semble remettre en question le projet d’une suppression radicale de l’État.
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