DESSERTINE, Pierre-Jean. " Essai d’élucidation d’une nouvelle forme de violence "

droitviolenceenfants et enfance

"La violence actuelle se donne comme arbitraire."

Dans l’actualité, il est désormais beaucoup question de manifestations violentes de la part de jeunes, en particulier dans les établissements scolaires. Mais nous n’entendons guère, à ce propos, que le discours du pouvoir. Or celui-ci ne peut être que trompeur. En effet, du point de vue de l’idéologie – du système de représentations dont se sert un pouvoir social pour se pérenniser –, la violence est toujours un épiphénomène. Et, à ce titre, elle doit être traitée localement. Ainsi, face à la multiplication des actes violents dans l’institution scolaire, les responsables politiques s’attachant à mettre en évidence des « cas » particuliers (tels les fameux « problèmes des banlieues »), proposent un « plan » de lutte ciblant les « établissements à problèmes » 1. Mais, du point de vue d’une pensée rigoureuse, dans l’exacte mesure où elle devient un problème social, c’est-à-dire un problème suffisamment général pour exiger une réponse politique, la violence n’est jamais un épiphénomène. Que l’État soit requis à intervenir signifie en effet qu’elle ne peut plus être référée à la contingence des passions humaines, mais qu’elle est le symptôme d’une déficience dans l’état social lui-même. Il apparaît ainsi qu’il y a un paradoxe intrinsèque de la visibilité publique de la violence : le discours que l’on tient sur elle est contradictoire avec la raison même qui oblige à en parler. Cette contradiction en dénote une plus profonde : la violence comme problème social est toujours un défi que le pouvoir établi ne peut reconnaître car il remet en cause le système des relations sociales dont il se nourrit.
Il revient donc à une pensée non partie prenante dans ces relations de pouvoir, à une pensée désintéressée, dont, entre autres, les philosophes revendiquent la prise en charge, d’investir ce problème de la multiplication actuelle des manifestations de violence émanant des jeunes générations. Elle seule peut le placer au niveau où il doit l’être : comme symptôme d’une fragilisation du tissu social.
[Lire la suite->http://refractions.plusloin.org/textes/refractions6/dessertine.htm