Du Droit au Travail de 1848. Réfutation. Le Droit à la paresse de Paul Lafargue

RÉFUTATION

travail, emploiparesse

Edition de 1883, paru originellement dans L’Egalité, en 1880
M. Thiers, dans le sein de la Commission sur l’instruction primaire de 1849, disait :

« Je veux rendre toute puissante l’influence du clergé, parce que je compte sur lui pour propager cette bonne philosophie qui apprend à l’homme qu’il est ici pour souffrir et non cette autre philosophie qui dit au contraire à l’homme : jouis. »


 M. Thiers formulait la morale de la classe bourgeoise dont il incarna l’égoïsme féroce et l’intelligence étroite.
La bourgeoisie, alors qu’elle luttait contre la noblesse soutenue par le clergé, arbora le libre-examen et l’athéisme ; mais, triomphante, elle changea de ton et d’allure ; et aujourd’hui elle entend étayer de la religion sa suprématie économique et politique. Au XVe et XVIe siècles, elle avait allègrement repris la tradition païenne et glorifiait la chair et ses passions, réprouvées par le christianisme ; de nos jours, gorgée de biens et de jouissances, elle renie les enseignements de ses penseurs, les Rabelais, les Diderot, et prêche l’abstinence aux salariés. La morale capitaliste, piteuse parodie de la morale chrétienne, frappe d’anathème la chair du travailleur ; elle prend pour idéal de réduire le producteur au plus petit minimum de besoins, de supprimer ses joies et ses passions, de le condamner au rôle de machine délivrant du travail sans trêve, ni merci.
Les socialistes révolutionnaires ont à recommencer le combat qu’ont combattu les philosophes et les pamphlétaires de la bourgeoisie ; ils ont à monter à l’assaut de la morale et des théories sociales du Capitalisme ; ils ont à démolir, dans les têtes de la classe appelée à l’action, les préjugés semés par la classe régnante ; ils ont à proclamer, à la face des cafards de toutes les morales, que la terre cessera d’être la vallée de larmes du travailleur ; que dans la société communiste de l’avenir, que nous fonderons « pacifiquement si possible, sinon violemment », les passions des hommes auront la bride sur le cou, car « toutes sont bonnes de leur nature, nous n’avons rien à éviter que leur mauvais usage et leurs excès » [1], et ils ne seront évités que par le contre-balancement mutuel des passions, que par le développement harmonique de l’organisme humain, car, dit le Dr Beddoe, « ce n’est que lorsqu’une race atteint son maximum de développement physique qu’elle atteint son plus haut point d’énergie et de vigueur morale » [2]. - Telle était aussi l’opinion du grand naturaliste, Charles Darwin [3].

[1Descartes, Les passions de l’âme

[2Docteur Beddoe, Memoirs of the anthropological Society

[3Ch. Darwin, Descent of man.