Déclaration approuvée par le comité radical de Mâcon, le 9 mars 1871.

Mâcon (Saône-et-Loire, France)

Une génération ne peut pas engager les générations à venir. Les coups d’État et les plébiscites sont les causes directes de tous les malheurs qui nous accablent.
« Les rois, disait le conventionnel Grégoire, sont dans l’ordre moral ce que les monstres sont dans l’ordre physique... L’histoire des rois est le martyrologe des nations... »
En conséquence, tous les prétendants doivent être à jamais bannis de France et mis hors la loi. Ils serviraient, par leur présence, de prétextes perpétuels à des discordes civiles. Les deux bases fondamentales de la tyrannie sont l’ignorance et la superstition. Il y a deux moyens de les faire crouler :
 L’instruction gratuite, obligatoire et radicalement laïque.
 La séparation de l’Église et de l’État, comprenant la suppression du budget des cultes.
Les écoles doivent être communes, afin de faire disparaître chez les enfants tous les préjugés de caste, qui sont des obstacles à l’égalité, à la fraternité. L’ensei-gnement de principes religieux doit y être interdit[...]. Il n’y aura plus conflit entre l’autorité civile et l’autorité religieuse. Les manifestations publiques des cultes doivent être rigoureusement interdites.
Les tribunaux sont institués pour défendre l’homme contre les abus de la force et du privilège.
En conséquence, la justice sera ramenée autant que possible à la gratuité. La procédure doit être publique. La justice aura pour base le jury. L’inamovibilité des magistrats disparaît. Comme tous les fonctionnaires, ils seront responsables de leurs actes, et pourront être directement poursuivis.
Les armées permanentes, trop puissantes à l’intérieur pour étouffer la liberté, sont trop faibles pour résister aux invasions étrangères. Nous venons d’en acquérir la preuve douloureuse. Elles doivent être licenciées (tout en tenant compte des positions acquises) et faire place à la nation armée. La conscription doit être abolie. Les guerres de conquête sont infâmes, la défense du sol est sacrée.
Le socialisme est l’étude des questions appelées à réaliser le but de la société : le bonheur commun.
La République est le milieu libre dans lequel peuvent se discuter les questions sociales. Dans ce cas, le rôle du gouvernement, mandataire de la collectivité des citoyens, doit se borner à laisser aux différentes écoles socialistes l’indépendance la plus complète, en donnant pour garantie les libertés de presse, de réunion et d’association.
Les causes de toutes les révolutions sont : les privilèges, l’inégalité devant les résultats, entre le capital et le travail. Le travail gorge le capital -, le capital nourrit à peine le travail. Faire une juste répartition des bénéfices entre le capital et le travail, c’est étouffer le germe des guerres civiles. Les républicains, qui veulent non seulement la concorde entre Français, mais entre les peuples de l’Europe, doivent associer leurs efforts pour arriver à l’application de ces principes par la liberté, la science et le travail.
Ils doivent néanmoins avoir toujours la main sur leurs armes, et ne pas se fatiguer de veiller. Il ne faut pas qu’un coup de force nous précipite de nouveau dans un avenir sans fin de révolutions.