"Louis Lecoin. Le Cours d’une vie". Le Commentaire de Cathy Ytak

LECOIN, LouisCommunication. FilmsYTAK, Cathy (1962-....)

Commentaire de Cathy Ytak

Impressionnant. C’est le mot qui vient à l’esprit lorsque l’on découvre Louis Lecoin à l’écran. Impressionnant par la force de ses propos antimilitaristes, l’énoncé tranquille de son anarchisme qui contrastent tellement avec son aspect chétif et malingre. Le P’tit Louis, tel qu’on le surnommait affectueusement, ne mesurait qu’un mètre 51… Mais ses convictions avaient la force de soulever des montagnes. Né le 30 septembre 1888 dans le Berry, Lecoin exerça très jeune divers petits métiers avant de devenir correcteur d’imprimerie, et syndicaliste à la C.G.T.
Antimilitariste, oui. Non-violent… pas vraiment ! Mais ce sont ses écrits qui le mèneront de nombreuses fois en prison. Après Blanqui, Lecoin est le militant politique qui a passé le plus d’année derrière les barreaux. Pas moins de 14 ans… Et pour des motifs aussi criminels que d’avoir distribué un tract appelant à la « Paix immédiate » au début de la seconde guerre mondiale, par exemple. Lecoin n’en démordra pas pour autant, et n’hésitera pas à dire, face à la caméra, que ce n’est pas tant la prison qui l’a fait souffrir que la trahison de ses nombreux amis, antimilitaristes devenant patriotards et va-t-en guerre acharnés… Contre la guerre, mais aussi contre toutes les injustices, Lecoin s’est battu pour sauver Sacco et Vanzetti de la mort, contre l’extradition d’Ascaso, Durruti et Jover, etc.
Ce passionnant documentaire a été réalisé dans les années soixante. Louis Lecoin avait obtenu, quelques années plus tôt, la création du statut d’objecteur de conscience, après trois semaines de grève de la faim… (il avait 74 ans !).
Il donne la parole à toute une foule de militants, compagnons de route, ou simples admirateurs de Lecoin. C’est avec bonheur que l’on retrouvera Georges Brassens parlant de la Fédération anarchiste, le pacifiste Robert Jospin (dont les idées n’ont malheureusement pas déteint sur son fils !), mais aussi Germaine Tillion, Morvan Lebesque, Pierre Martin ou encore Henri Jeanson… ainsi qu’Yves Montand, assurant le commentaire en voix off.
Bien documenté, laissant largement les intervenants s’exprimer librement devant la caméra, ce documentaire est bien mené, bien monté et très agréable à regarder. Il s’achève par un retour de Lecoin dans le village de son enfance, retrouvant avec effusion ses anciens copains… Quelques minutes grandiloquentes et sentimentales, un peu inutiles. Comme si les réalisateurs de l’époque avaient voulu terminer sur un tableau champêtre, afin d’atténuer les propos par trop libertaires entendus auparavant !
Voir aussi le commentaire de Pietro Ferrua