Poudding Salvator

BAKUNIN, Mihail Aleksandrovič (1814-1876)ANGAUT, Jean-Christophe

"J’ai ainsi dénommé cet entremets, parce qu’il fut servi pour la première fois dans une agape qui eut lieu l’hiver de 1875-1876 à Lugano (Tessin-Suisse) au pied du mont Salvator [San Salvatore] qui se baigne dans le lac del Cerisio [Ceresio] ; à la suite d’un conciliabule entre les citoyens Benoît Malon, Arthur Arould, [Errico] Malatesta, Jules Guesde, Elisée Reclus, Michel Backounine [Bakounine] et moi, à l’issue de la conférence je fis la cuisine...
... Cuisine hétérogène s’il en fut, elle se composait d’agonis frits (poisssons du lac), d’un risotto et d’un pouding. Malon et Arnould buvaient du vin rouge de Barolo ; Malatesta, Jules Guesde et moi du vin blanc d’Asti et Elisée Reclus de l’eau. Backounine, après avoir bu un verre de bière et avant que l’entremets fut servi, se mit à boire à mesure qu’il s’animait, des rasades de tasses de thé, comme s’il y avait puisé sa verve chaude et éloquente, en même temps qu’il nous fumait vivants ave ses cigarettes de tabac turc ; ce qui n’avait rien d’agréable ni pour Elisée Reclus, ni pour moi, ayant été obligés d’ouvrir, par un temps froid, les fenêtres du local non chauffé. Jamais réunion aussi peu nombreuse n’avait offert pour moi autant de diversité de goûts que celle-ci ; et chose remarquable, si l’entente a été impossible sur les grandes questions humanitaires, sur la solution à donner au modus vivendi à suivre pour le bonheur des peuples, les six ou sept doctrinaires, abstèmes, créophages, végétariens et gastrosophes, se trouvèrent d’accord pour reconnaître l’exquisité du pouding."
Joseph Favre, Dictionnaire universel de cuisine et d’hygiène alimentaire, 1895, rééd. 1978 et 2010 (Dictionnaire universel de cuisine pratique, Omnibus)

Pouding Salvator

de Joseph Favre
Procédé
Beurrer et chemiser un moule uni avec du papier blanc.
Couper transversalement un gâteau de Compiègne en cinq abaisses ;les abricoter largement avec une marmelade d’abricots ramollis au marasquin ;hacher menu de l’angélique et du gingembre confits au sucre ;mettre au fond du moule une abaisse, en réserver une autre pour le dessus ;couper les autres par morceaux et les mettre pèle-mêle dans la timbale avec les fruits ;faire cuire 3 décilitres de lait avec un peu de sucre ;casser dans un saladier 3 oeufs entiers, ajouter un décilitre de marasquin et le lait bouillant en fouettant avec une fourchette ;verser dans latimbale et faire pocher au bain-marie au four pendant trente minutes.
Accompagner d’un sabayon au marasquin.
Gâteau de Compiègne
Passez 125 grammes de belle farine au tamis, faites deux fontaines comme à la pâte à brioche, prenez un peu plus que le quart de votre farine pour faire un levain, mettez-y un plus de levure, et tenez votre levain moins ferme que pour la brioche, faites-la revenir et mettez dans votre grande fontaine une once de sel, un bon verre d’eau, une bonne poignée de sucre fin, le zeste de deux citrons bien hachés, du cédrat confit et coupé en petits dés. Faites votre pâte comme il est indiqué à l’article Pâte à brioches, tenez-la plus molle, beurrez un moule, mettez-y votre pâte, laissez-la revenir selon la fraîcheur de la levure pas plus de une heure à deux heures, mettez votre gâteau cuire pendant deux heures à un four bien atteint, renversez-le du moule et servez-le froid pour grosse pièce.