Les congrès internationaux anarchistes
Le mouvement anarchiste international, pour essayer de renforcer son action, fut tenté d’organiser de grandes rencontres, au cours desquelles certaines décisions devaient être prises, notamment la mise sur pied d’organes de coordination internationale. Si les réunions rassemblant des anarchistes venant de différents pays furent évidemment plus nombreuses, on compte pour cette période trois grands congrès, que nous allons passer en revue. Nous expliquerons comment ceux-ci furent mis sur pied (et la part que la Belgique francophone y prit), ce qui s’y passa, les décisions qu’on y prit. Bref, nous tenterons d’en restituer « l’ambiance », avec une attention particulière pour la position belge (ou plus exactement les positions des Belges) dans les débats qui y eurent cours. Nous mentionnerons aussi, à chaque fois que nous le pourrons, le nom des militants anarchistes belges qui y prirent part.
Le premier congrès international anarchiste (Paris, 1948)
La reprise des relations internationales entre les organisations et militants anarchistes s’est faite directement après la seconde guerre mondiale. La première initiative a été initiée en France par le Mouvement libertaire espagnol en exil et le Mouvement libertaire français alors en voie de reconstruction . Le but d’un rassemblement international était de s’interroger sur la situation et les possibilités d’action des mouvements anarchistes dans le monde et, enfin, de créer des liens et un réseau de solidarité internationale. Une commission pro-congrès international fut même créée, mais les conflits internes au mouvement français vont ralentir le mouvement. Pour repartir sur de nouvelles bases, l’idée d’une première conférence anarchiste européenne est lancée en février 1947 . Celle-ci aura lieu du 15 au 17 mai 1948 à Paris . Plusieurs pays y furent représentés : la France avec la Fédération Anarchiste française, l’Angleterre, la Fédération Anarchiste italienne, des Suisses, les groupes exilés bulgares, le Mouvement libertaire espagnol et le Groupe libertaire juif de Paris. Nous savons que Hem DAY y a participé . Un Secrétariat provisoire des relations internationales (S.P.R.I.) fut créé avec pour tâche de préparer sérieusement un congrès mondial qui devait avoir lieu le plus rapidement possible. Mais des tensions éclatèrent au niveau international à propos de la forme de regroupement à adopter. Certains considéraient celui-ci comme une internationale rigide et monolithique excluant tous les non-conformistes, tandis que d’autres préféraient y voir un simple instrument de travail sans prétention représentative et sans pouvoir de décision propre, bref, comme une organisation décentralisée et débureaucratisée qui se tiendrait en relation avec toutes les tendances de l’anarchisme militant et n’en favoriserait aucune . Cette deuxième option fut finalement adoptée et le premier congrès anarchiste international eut lieu à Paris en novembre 1949 . Mécontente de cet arrangement, la délégation bulgare se retira . De nombreuses délégations venues du monde entier vinrent s’ajouter à celles déjà présentes lors du premier congrès européen. Il y avait des délégations venant d’Allemagne, d’Autriche, de Belgique, de Hollande, d’Argentine, de Bolivie, de Cuba, du Mexique, ainsi que des individus non-représentants d’une nation qui venaient des États-Unis et du Canada. Outre cette participation assez importante en dépit des entraves légales et des difficultés économiques, il faut encore signaler que des lettres d’excuses et de soutien furent reçues en provenance du Chili, du Panama, d’Uruguay, d’Australie, de Corée et du Japon. Toutefois, si le nombre de délégations était satisfaisant, le congrès ne fut pas un succès d’affluence ni d’influence. On s’y contenta de réaffirmer le principe de l’Internationale, qui était d’établir des relations entre les anarchistes par-delà les frontières. Le S.P.R.I. changea de nom pour devenir la Commission de Relations Internationales Anarchistes (C.R.I.A.). Plus concrètement, une Commission Continentale et un centre d’archives auquel on donna le nom de Bibliothèque-archive internationale anarchiste furent créées à Montévidéo . Les anarchistes d’Amérique du Sud furent très actifs dans ce mouvement. Ils organiseront d’ailleurs en 1957, toujours à Montévidéo, une conférence continentale américaine. A la suite de cette conférence, une Semaine de la Presse Anarchistes Internationale, comportant une exposition et des conférences, eut lieu à Paris en février 1954 . Celle-ci fut organisée par Hem DAY et Ugo FEDELI . La C.R.I.A. se dota aussi d’un Bulletin, qui parut jusqu’en avril 1957.