COEURDEROY, Ernest. Corrida.

Nature. VégétarismeanimalGODWIN, William (1756-1836). Romancier, philosophe et théoricien politique anglaisCOEURDEROY, Ernest (Avallon, Yonne, France, 1825/22/01 - 1862/10/25 ?)* bibliographieTHÉVENET, Alain (1941-....)BONNARDEL, Yves

Corrida. Madrid, 1853 / Ernest Coeurderoy. Précédé de Ernest Coeurderoy, poète, anarchiste / Alain Thévenet. Suivi de Les pieds dans le plat / Yves Bonnardel. Lyon (BP 1186, F-69202 Cedex 1) : Atelier de création libertaire, 2003. 61 p. couv. ill. en coul. ; 21 cm

Bien sûr, il s’agit d’un texte contre la corrida. Mais d’un texte qui date de 1853 - à une époque où c’était très inattendu - écrit par l’un des participants aux journées de barricades de juin 1848 et de mai 1849 à Paris, forcé à l’exil par Louis-Napoléon - notamment à Madrid.
Outre le style de l’auteur, cette oeuvre est particulièrement intéressante par la description que Cœurderoy fait de la corrida d’alors (on pourra dire qu’elle a beaucoup ou au contraire très peu évolué, c’est selon !), et, surtout, par la critique résolue qu’il enfait du point de vue de la souffrance des animaux concernés (taureaux et chevaux), dont il épouse absolument la cause : « Je sympathise avec le taureau. C’est bête, mais c’est juste ». Il se fait fort de répondre aux arguments pro-corrida, s’attardant pour cela longuement sur la question de la consommation de viande, qu’il qualifie d’« horrible injustice ». Il appelle explicitement de ses voeux « ces époques fortunées » où l’on ne massacrera plus pourvivre, où la corrida et toutes les autres formes d’exploitation ou de domination sur les animaux auront disparu. Il évoque déjà des « droits des animaux » et parle d’équité et de justice à leur égard, que notre « soif de la domination » leur dénie...
Cœurderoy était déjà connu, dans les milieux de l’ultra-gauche comme un visionnaire, révolté et exalté (cf. son livre Hourrah, ou la Révolution par les Cosaques !), anticipant les anarchistes individualistes qui apparaîtront quelques décennies plus tard. La publication de Corrida nous permet d’éclairer de lueurs nouvelles ce que l’on croyait savoir de cet homme singulier. Cette publication comprend aussi Ernest Cœurderoy, poète, anarchiste, préface de A. Thévenet qui restitue cette œuvre dans la vie de son auteur et dans son époque, et Les pieds dans le plat, de Y. Bonnardel, postface qui s’essaye témérairement à établir que cette pensée, âgée déjà d’un siècle et demi, préfigure parfois certaines idées antispécistes contemporaines.
Yves Bonnardel, Les Cahiers antispécistes N° 23 (décembre 2003)